Au cœur du bloc avec Aude Lubet.

« Je m’appelle Aude Lubet, j’ai 32 ans, je suis atteinte du syndrome de Loeys-Dietz* (apparenté au syndrome de Marfan).
J’ai été opérée en 2014, à 24 ans, de l’aorte ascendante. Je suis mère au foyer, j’ai une petite fille de 8 ans, atteinte aussi du même syndrome.
Je suis bénévole de l’association Marfans* depuis 3 ans.
À quel moment a-t-on diagnostiqué votre maladie ?
On m’a d’abord fait un premier examen clinique à l’âge de 13 ans lorsque l’on a découvert chez ma mère une dissection aortique. À ce moment-là on m’a dit que je n’étais pas malade.Puis ma mère est décédée alors que j’avais 19 ans.
Ma sœur alors atteinte du même syndrome m’a demandé de venir avec elle au CHU de Bordeaux. L’idée de départ était de faire avancer la recherche, les médecins avaient besoin d’examiner, dans une même famille, une personne atteinte et une personne saine.
Je suis donc allée avec elle et au moment des tests, il s’est avéré que j’avais de nombreux signes proches du syndrome de Marfan. Puis, à la suite d’une échographie cardiaque, le résultat est tombé : mon aorte était dilatée.
J’avais 19 ans et j'étais suspectée d'être atteinte du syndrome de Marfan. Il y a seulement 3 ans, nous avons appris par résultat génétique que c'était le syndrome de Loeys-Dietz (apparenté au syndrome de Marfan).
Aujourd’hui on sait que ma grand-mère, ma mère, ma sœur, ma fille, et moi étions, ou sommes atteintes de ce même syndrome.
Comment expliquer le syndrome de Marfan simplement ?
Il s’agit d’une maladie génétique. Elle est due à une production insuffisante de « fibrilline », une protéine indispensable à la solidité des tissus de soutien de l'organisme comme les muscles, les os, les vaisseaux, les veines…
Quelles sont les incidences sur la vie quotidienne de votre petite fille ?
Tout d'abord, il faut savoir que les conséquences varient d’une personne à l’autre (cardiaque, osseux…)
Chez ma fille cela entraîne une grande fatigue, des douleurs chroniques et une instabilité de son quotidien qui n’est pas celui d’un enfant « normal ».
Par exemple, ma fille est scolarisée à la maison et elle a de nombreux rendez-vous : psychomoteur, mais aussi, une prise en charge en kinésithérapie... Elle pratique le sport mais sur ordonnance.
Actuellement, elle prend un traitement bêta-bloquant pour retarder une éventuelle opération et qui sait ne jamais être opérée.🙂
Comment avez-vous connu l’association Marfans ?
Quand ma mère a été malade, j’ai effectué des recherches sur internet pour comprendre sa maladie. Je me suis rapprochée plusieurs fois de l’association. L’association a 25 ans, et cela fait presque 20 ans que je connais le syndrome.
J’ai pu assister aux grands progrès de la médecine sur la connaissance de cette maladie. Quand j’ai su pour ma fille, elle avait 3 ans, j’ai alors eu besoin de m’investir pour servir à quelque chose, mais j’ai mis un peu de temps avant de sauter le pas.
Pensez-vous qu’il est important de montrer des photographies d’art prises en chirurgie cardiaque ?
Au départ je me demandais bien comment c’était possible, je n’en avais jamais vu. On s’imagine quelque chose d’assez violent car on nous ouvre, on nous écarte, on nous casse…
Et lorsque j’ai vu l'exposition "Au cœur du bloc", les photos montrent autre chose.
J’ai été impressionnée et éblouie, c’est très surprenant !
Pour moi, cela m’a permis de lever un voile de 9h dans ma vie : c'était le temps de mon opération. Même si on m’a bien expliqué en amont ce qui allait se passer, je n’avais pas vraiment conscience concrètement du déroulé.
En fait je trouve que c’est magnifique et en même temps thérapeutique, comme si ça faisait du bien de comprendre ! Et je tiens à remercier Natacha* pour ce travail splendide !
Quels sont vos liens avec le chirurgien et le personnel soignant ?
C’est très particulier pour moi car le chirurgien qui m’a opérée a d’abord opéré ma mère lorsque j’avais 13 ans.
À l'époque, le Professeur François Roubertie, chirurgien cardiaque au CHU de Bordeaux avait demandé à mon frère, ma sœur et moi de dire au revoir à notre maman car il n’était pas certain de pouvoir la sauver. Elle est sortie en vie, et, elle a vécu encore 5 ans.
Puis ma sœur a été opérée avant d’être enceinte. L’intervention devait être réalisée par un autre chirurgien. À ce moment-là, j’avais dit à ma sœur : « écoute c’est une opération compliquée pour toi mais pour moi aussi. Ce qui serait bien c’est que tu sois opérée par le même chirurgien que maman, je serai rassurée. »
Elle m'avait alors répondu « mais non, ne t'inquiète pas, ils en sont tous capables. » L’anecdote, c’est qu’une semaine avant son opération le chirurgien qui devait l’opérer s’est cassé le bras. Du coup son intervention a été effectuée par le même chirurgien que notre maman.
Puis, par la suite, c’est aussi lui qui m’a opérée.
J’ai été très chouchoutée par tout le personnel et je les remercie vraiment tous.
Dernièrement, en décembre 2021, j'ai revu le Professeur François Roubertie du CHU Haut-Levêque à Bordeaux lors d’un congrès de la SFCTCV*. On a pu rediscuter et on reste en contact.
Aude Lubet est membre du bureau, chargée de communication, déléguée régionale Nouvelle-Aquitaine et Occitanie de l’association Marfans.
Découvrir l’association Marfans ?
Quelles sont les missions de l’association Marfans ?
La première chose pour nous c’est un rôle d’information, il est très important de faire connaître le syndrome de Marfan et les syndromes apparentés, car même si on n’en guérit pas encore aujourd’hui, on peut ralentir la maladie, la stabiliser... Les médecins sont de plus en plus nombreux à avoir entendu parler du syndrome de Marfan.
C’est plus délicat avec le syndrome de Loeys-Dietz qui est encore plus rare.
Alors le combat continue…
Nous menons aussi des actions pour récolter des fonds dans le but d’aider et de faire avancer la recherche.
En savoir plus sur l’association Marfans* : www.assomarfans.fr / 01 39 12 14 49 / facebook et instagram : assomarfans /
En savoir plus sur le syndrome de Loeys-Dietz* : ICI
SFCTCV* : Société Française de Chirurgie Thoracique et Cardio-Vasculaire
En savoir plus : www.sfctcv.org
Natacha Sibellas* en chirurgie cardiaque : ICI
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